22/02/2011
GEORGES MANDEL AUX P.T.T.(1934-1936) : PREMIERS TEMOIGNAGES
Le 15 février 1935, Le journal « L’Excelsior » publia un article sur le nouveau ministre des PTT, Georges Mandel, qui, depuis sa nomination en novembre 1934, s’ingéniait à accroître le rôle et renverser l’image d’une administration décriée comptant 150.000 agents à sa prise de fonction. Son bilan à ce poste dépassa celui de tous ses prédécesseurs, en sorte que le ministre natif de Chatou, qui avait commencé par occuper un espace politique restreint à l’aura de son ancien chef Clemenceau, acquit une popularité due à ses seuls mérites auprès des Français.
Par-delà l'aspect technique de son poste, le nouveau ministre démontrait que l’efficacité existait encore en politique et qu’une volonté ferme et un intérêt non superficiel pour la chose publique constituaient les premières sources du progrès et de la défense du pays.
Son œuvre envers les usagers devait fortement contribuer à assurer sa réélection au premier tour de député indépendant conservateur à la Chambre en 1936 en plein triomphe du Front Populaire.
Voici un extrait de cet article de « L’Excelsior » signé par Emile Vuillermoz (1878-1960), alors le plus célèbre critique français de musique et de cinéma :
« Je suis donc allé trouver, au cœur de la citadelle des PTT, Monsieur Georges Mandel, et je lui ai demandé, sans détours, s’il partageait cette sorte d’optimisme ingénu et obstiné qui semble être le mot d’ordre de certains techniciens de son administration.
A la suite de mes articles, certains commentateurs plus ou moins « officieux » - ou, qui, du moins, seraient heureux de passer pour tels – ont cru, en effet, devoir, pour rassurer l’opinion publique, affirmer, que, contrairement à mes informations, tout était pour le mieux dans la meilleure des radiophonies françaises, et que, depuis bien longtemps, notre équipement technique était supérieur à celui de nos rivaux ! notre ministre était-il victime, lui aussi, de cet extraordinaire illusionnisme ? c’est ce que j’ai voulu élucider au cours d’un entretien dont nos lecteurs apprécieront l’intérêt.
(…) On connaît la silhouette si caractéristique de l’homme et de son visage intelligent et glacial, dont les lèvres rectilignes ont désappris le sourire dans l’exercice conscient du pouvoir. Sa voix est incisive et pénétrante. Dans la symphonie particulière, j’ai entendu beaucoup de violoncelles, de trompettes, de bassons, de trombones et saxophones : la voix de Monsieur Mandel est instrument à anche. Elle a la finesse insinuante et pincée du hautbois ou du cor anglais, qui sans forcer le son, domine aisément tout un orchestre. Sa facilité de parole est merveilleuse. D’un ton calme et posé , il construit des phrases impeccables avec des mots extrêmement choisis qui naissent tout naturellement sur ses lèvres, dans une spontanéité déconcertante. La précision et la justesse de son vocabulaire est miraculeuse. Quand il traite une question, il fait littéralement la dissection et l’autopsie, d’un scalpel impitoyable. Tout ce qu’il expose devient clair, logique, lumineux et prend un caractère de nécessité absolue.
Mais son originalité et son privilège consistent à faire passer immédiatement dans l’action cette éloquence qui pourrait aisément lui tenir lieu de volonté et d’activité. Ses subordonnés ont en lui un chef d’une clairvoyance redoutable. Sans aucune passion – car sa raison pure est aussi incapable de malveillance systématique que d’indulgence naturelle – il pèse leurs qualités et leurs défauts sur une balance de précision. Si j’étais sous ses ordres, je tremblerais en l’écoutant exposer avec une froide sérénité le problème de l’utilisation des compétences.
M. Mandel n’a pas craint de m’affirmer très nettement qu’il juge aussi sévèrement que moi l’état actuel de notre radio. Il ne partage donc nullement la satisfaction béate de ses collaborateurs qui se félicitent chaque jour d’avoir tant de génie.
(…) Malheureusement , nous sommes dans un pays où, par un absurde scrupule démagogique, nous n’avons fait, pendant la guerre, aucune réserve de « matériel humain » dans le domaine de l’intelligence. Alors que nos adversaires opéraient judicieusement ce tri, pour préparer des cadres à la civilisation future, nous avons tout jeté dans la fournaise et Monsieur Mandel, qui sait juger les hommes, blâme sévèrement cette erreur de tactique sociale qui le prive peut-être aujourd’hui des jeunes lieutenants dont il aurait besoin.
Au point de vue de l’installation matérielle de nos postes, le ministre des PTT subit avec impatience le handicap écrasant des lenteurs administratives. Lui aussi ne se résigne pas volontiers à voir l’Etat mettre trois ou quatre ans pour accomplir un travail que l’industrie privée exécute en moins d’une année. Les formalités auxquelles un service d’Etat est soumis entravent tout et ralentissent tout. Des marchés importants, signés en 1932, ne sont pas encore exécutés. Des postes et des câbles qui devraient depuis longtemps être en service sont en cours de construction ou de pose avec des retards déplorables. Il serait injuste de parler de négligence ou de mauvaise volonté. Car la machine administrative est un engrenage qui fonctionne au ralenti, au grand désespoir des hommes d’action qui ont à s’en servir.
Mais Monsieur Mandel a décidé de donner une impulsion vigoureuse à tous ses services. Il ne me fait mystère d’aucune des précisions du rapport qu’il vient de soumettre aux commissions parlementaires. Se gardant bien de dire : « tout est prêt, tout est terminé depuis longtemps, il ne manque pas un bouton de réglage à nos postes d’émission, ni un centimètre de câble radiophonique », il se contente de saluer quelques heureuses échéances prochaines qui amélioreront enfin notre réseau d’Etat en mettant "à la page" nos stations régionales.
C’est ainsi que la puissance du poste de Lyon sera portée à 90 kw à partir du mois d’avril prochain. Une grave avarie de matériel, survenue pendant le transport, a, seule, retardé les essais prévus pour une date antérieure. Mais on espère rattraper le temps perdu. Le poste de Toulouse sera porté à 120 kw au mois d’avril. En avril, également, Lille disposera de 60 kw ; en septembre, celui de Marseille, 100 kw, et, à la fin de l’année, celui de l’Ouest-Rennes, 120 kw. On nous promet, en outre, pour le début de juin, la transformation du poste national des PTT, dont la puissance sera fixée à 120 kw.
A ces prévisions, il faut ajouter, à des échéances plus lointaines, deux augmentations de puissance, celle de la station de Bordeaux (100 kw) et celle de la station de Strasbourg (100 kw). Il entre aussi dans les projets de Monsieur Mandel de créer sans retard une station nouvelle de 100 kw à Limoges.
Viendra ensuite l’augmentation de puissance tant attendue du poste Radio-Paris qui n’arrive pas à couvrir tout notre territoire et qui disposera, l’an prochain de 220 kw. Une transformation du poste colonial complètera cette organisation si souhaitable. A ce moment-là, nous pourrons utiliser, espérons-le, le fameux réseau des câbles spéciaux, ces câbles-fantômes qui, d’après les documents officiels de 1933, étaient déjà « en service » alors que l’annuaire officiel des PTT de 1934 avoue modestement qu’ils sont encore « en cours de pose ».
Vous voyez que nous sortons nettement ici du système d’auto-congratulation dans lequel se réfugient si volontiers certains fonctionnaires de notre administration. Et j’avoue qu’il est beaucoup plus réconfortant d’entendre un généralissime déclarer : « nous avons été battus dans tel et tel secteur, mais voici les offensives que je prépare pour redresser la situation » que de collectionner des bulletins de victoires purement imaginaires.
Reste la question importante de la Maison de la Radio. Notre ministre des PTT en comprend toute l’importance et est bien décidé à doter notre radio d’Etat de cet organisme technique absolument indispensable. Il dément nettement toutes les informations fantaisistes qu’on a fait courir au sujet de l’utilisation de tel ou tel immeuble que l’on camouflerait plus ou moins habilement pour la circonstance. Monsieur Mandel sait parfaitement qu’une Maison de la radio doit répondre à des exigences scientifiques très spéciales. Une seule chose l’arrête : la constatation que l’Etat est incapable de construire un édifice dans des conditions raisonnables. L’Etat paye tout trop cher. Monsieur Mandel voudrait ne pas gaspiller ses crédits et il cherche, en ce moment, le moyen de ne pas engloutir inutilement, dans une entreprise ruineuse de bâtisse officielle, des fonds dont il a tant besoin dans d’autres domaines. N’oublions pas, en effet, que, par le fait même du retard de nos postes, notre radio nationale a beaucoup moins d’usagers que celle de l’Angleterre ou de l’Allemagne. Notre taxe produit 110 millions alors que la radio anglaise en mobilise 420 et la radio allemande 770. Notre radio a donc un budget relativement limité. Mais plus notre installation se perfectionnera et plus nous accroîtrons rapidement cette rente.
Donc, au point de vue de l’équipement technique – progrès capital qui conditionne tous les autres – Monsieur Mandel est décidé à agir vigoureusement pour rattraper le temps perdu. Il n’apporte pas moins d’énergie à réorganiser les émissions. Pour lui, la radio a trois missions : l’information, l’éducation et la récréation. L’organisation de la presse parlée est, de sa part, l’objet d’une attention vigilante. Il n’y tolèrera aucun élément tendancieux. Il faut que les revues de presse de la radio d’Etat soient d’une impartialité et d’une objectivité inattaquables. Monsieur Mandel sera impitoyable pour toutes les fautes commises dans cet ordre d’idées. Dans l’ordre éducatif et récréatif, il entend faire appel à un comité supérieur des émissions complètement réorganisé dans lequel il s’est efforcé de mettre chacun à sa place.(…) Il a séparé nettement la section administrative, composée de personnalités officielles, de la section technique proprement dite, qui comportera 36 spécialistes qualifiés, chargés de mettre en œuvre les ressources intellectuelles et artistiques de notre pays.
Pour bien montrer son désir de rompre avec le paresseux égocentrisme de Monsieur Badin, Monsieur Mandel a comblé une lacune incroyable en créant un service d’écoute qui permet, chaque jour, à un certain nombre de chargés de mission de capter les postes étrangers et de rédiger un rapport sur ce qu’ils viennent d’entendre. On n’y avait pas encore pensé ! bref, la lutte contre la routine est engagée et elle est menée par un homme dans la ténacité et la méthode duquel on peut avoir confiance.
Et j’ai quitté le ministère des PTT avec la satisfaction de constater que les doléances de tous les sans-filistes de France et des amis que la France compte à l’étranger étaient, enfin, prises au sérieux. On ne nous berne plus en nous affirmant que nous possédons une radio d’Etat que l’Europe nous envie. On ne nous a pas caché, au contraire, qu’elle avait besoin de soins. Mais nous trouvons à son chevet un médecin énergique, décidé à publier loyalement ses bulletins de santé. Vous venez de lire le premier et j’estime qu’il est de nature à vous rassurer sur le sort de la malade, qui ne tardera pas, espérons-le, à entrer en convalescence. »
Publié dans : GEORGES MANDEL, CHATOU ET L'ENTRE-DEUX-GUERRES | 01:14 | Commentaires (0) | Lien permanent
09/10/2009
L'URBANISATION DE CHATOU 1920-1940
Au sortir de la Première Guerre, Chatou continuait de vendre ses charmes de cité de villégiature. La clientèle avait changé, les moyens et les besoins aussi. Finies les grandes villas de maître de la Belle Epoque en pierre de taille, décor de briques et toiture Mansart. La "démocratisation" de l'habitation individuelle, apparue vers 1880, trouva un nouveau souffle dans le pavillon de banlieue, devenu un luxe aujourd'hui. Les architectes se tournèrent vers des matèriaux plus économiques, la pierre meulière et le béton, tout en cherchant à maintenir un style décoratif en façade illustré par l'emploi de céramiques, pans de bois, balustrades en fer forgé. Parmi les lotissements, le Parc de Chatou fut en enfin créé aprés deux tentatives avortées à la veille des guerres de 1870 et 1914 et une société civile, la société Pharos, constituée en 1925 pour la gestion de ses voies.
Publié dans CHATOU ET L'ENTRE-DEUX-GUERRES | 14:08 | Commentaires (0) | Lien permanent
27/04/2008
LE PREMIER BARRAGE DE CHATOU
"L'Intransigeant" du 16 juillet 1932 :
"La construction du grand barrage de Chatou, destiné à remplacer le vétuste barrage de Bezons, a été commencée il y a environ cinq ans. Le nouveau barrage vient d'être mis en service par le service de la Navigation mardi dernier.
Il est constitué par trois double vannes Stoney d'une largeur de 30,50 m, d'une hauteur de trois mètres et d'un poids de 100 tonnes chacune.
Les vannes supérieures y sont manoeuvrées par des treuils électriques et les vannes inférieures qui ne sont levées qu'en temps de crûe sont mues par des vérins hydrauliques d'une force de 300 tonnes.
En cas d'avarie grave, deux "batardeaux" d'un poids total de 280 tonnes peuvent être placés à l'aide d'un pont roulant en aval et en amont et permettent de mettre le "radier" complètement à sec.
Ce barrage moderne retient l'eau de Suresnes à Bougival.
La hauteur d'eau normale est de 23,22 m en amont et 19,95 m en aval (ces chiffres sont donnés par rapport au niveau de la mer).
En temps de crûe, les vannes étant relevées, la navigation peut utiliser le bras où est construit le barrage ("la Rivière Neuve"). La construction du barrage de Chatou et la suppression du barrage de Bezons constituent la première partie du plan de protection de Paris contre les inondations."
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