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31/05/2009

LEON MELCHISSEDEC, UN GRAND ARTISTE LYRIQUE DANS LE QUARTIER GAMBETTA

 

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Léon Melchissédec, un artiste lyrique qui eut une carrière presque aussi longue que Sarah Bernhardt, devenu une vedette du cylindre Pathé à la fin de sa vie - portrait : "Livre d'or du phonographe Pathé - 1904" - fondation Jérôme Seydoux-Pathé
 
 

Le quartier Gambetta a longtemps eu son passé occulté. Cette injustice doit prendre fin. Evoquons l’un de ses grands hommes, Léon Melchissédec. Né à Clermont-Ferrand le 7 mai 1843 et mort à Paris en 1925,  il fut un artiste lyrique à la carrière extraordinairement longue et variée. Extraordinairement longue, peut être la plus longue de l’histoire lyrique, puisqu’elle débuta en décembre 1862 à Rive-de-Gier dans la Loire par un concert donné au bénéfice de mineurs brûlés où il chanta  le grand air de « Lucie » de Donizetti, et se termina par une soirée de cinquantenaire au Trocadéro le 24 avril 1913. C’est du moins ce qu’écrivit l’intéressé avant les hostilités. Carrière variée puisqu’il tint tour à tour les rôles de ténors, de barytons d’opéra-comique, de baryton de grand opéra, de basses chantantes d’opéra-comique et enfin de secondes basses.  Il fut professeur de déclamation lyrique au Conservatoire de Paris de 1894 à sa mort en 1925, l’auteur de plusieurs communications à l’Académie des Sciences dont “La physiologie de la voix” (1890), “Le résonateur buccal” (1911), “Sur la théorie mécanique de quelques tuyaux sonores” et celui de plusieurs ouvrages dont « Pour chanter, ce qu’il faut savoir » (1913), « Le chant, la déclamation lyrique, l’émission et la voix » (1925). Le 29 décembre 1910, il fut nommé Chevalier de la Légion d’Honneur. A plus de 60 ans, il enregistra pour Pathé à Chatou un répertoire de cylindres, parmi les plus chers au monde aujourd’hui.

Sa villégiature en Belgique en juillet 1914 à la suite des concours où il était juré avait tourné court avec l’arrivée de l’armée allemande. Il fut libéré par son fils à la fin de la Première Guerre et chanta pour la dernière fois le 19 novembre 1919 « Les deux grenadiers » de Schumann devant la Société des Médaillés Militaires. Membre de la municipalité de Maurice Berteaux de 1896 à 1900, il vécut 3 avenue des Coteaux, aujourd’hui à l’angle de l’avenue Gambetta et de la rue des Coteaux, dans une villa qui a été détruite dans les années 60.

 

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collection Pierre Arrivetz

 

 

03/05/2009

MAURICE UTRILLO PEINT L'EGLISE DE CHATOU

 

Chatou occupe une place dans la peinture tant pour les grands que les petits maîtres : Derain, Vlaminck, Pharamond Blanchard, Jacomin, Karbowsky, Champenois qui ont habité Chatou, Renoir qui a fréquenté Chatou et peint pour l’éternité ses hôtes de la maison Fournaise. L’historien et ancien maire de Chatou Jacques Catinat mentionne également dans son ouvrage « Les grandes heures de Chatou » le peintre Utrillo (1883 né à la Butte Montmartre -1955), dont on sait qu’il fréquenta Chatou depuis sa résidence du Vésinet où il demeura à partir de 1935. Celui honora notre commune d’une toile, « l’église Notre-Dame ».

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A l’heure de l’importante exposition qui lui est consacrée par la Ville de Paris place de la Madeleine, les heures de tranquillité du fils de Suzanne Valadon dans sa propriété de « La bonne Lucie » au Vésinet, qui longtemps connut une vie de souffrance et d’errements,  méritent d’être rappelées : laissons donc parler le journaliste « H.K » dans la chronique qu’il réussit à lui consacrer dans le Monde Illustré du 21 juillet 1945, dix ans avant la mort du peintre :

 

« nous sommes arrivés. C’est ici La Bonne Lucie. Un portail laqué blanc s’ouvre sur un décor d’une étonnante luminosité : pelouses verdoyant sous la pluie des jets d’eau, allées sablées, fulgurants géraniums, arcade de crépi rose noyée dans la ramée d’un saule (qu’on n’ose appeler pleureur tant est joyeux l’éclat de son feuillage !), maison rose à boiseries blanches et, dans une volière, vingt perruches bleues qui chantent  et s’activent, car elles ont « goûté le plaisir des amours printanières », et une quantité de petites perruches vont naître bientôt. A l’extérieur de la rose maison, la fête des couleurs continue ; tout est sourire et harmonie. Et c’est dans cette ambiance qui tient du conte de fées que le « frère douloureux de Baudelaire et d’Edgar Poe », l’ancien mauvais garçon qui a fini par bien tourner, coule des jours paisibles. « Il a trouvé une femme qui lui donnera le bonheur », disait Suzanne Valadon lorsque son fils épousa Lucie Valore, veuve du sympathique amateur d’art belge Robert Pauwels. Finis les temps difficiles, pour le peintre de la Butte. Il y a loin de Montmartre au Vésinet, du Lapin Agile à la maison de crépi rose ! tout dans cette installation a déjà un cachet d’immortalité  et nous imaginons nos arrière-neveux, venant ici en pieuse visite, comme nous pélerinons dans la demeure tolédane du Greco…

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Utrillo et Lucie Valore dans leur maison du Vésinet 18 rue des Bouleaux en 1945

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 Utrillo n’est pas un travailleur acharné. Il peint vite, mais seulement quand cela lui plaît. Les exhortations des amateurs d’art et des marchands de tableaux n’y peuvent rien changer. Il se lève tard, et reste toute la matinée à errer dans sa chambre, va respirer sur le balcon, récite ses prières, fume cigarette sur cigarette. Il est midi lorsqu’il prend son café au lait et 14 heures lorsqu’il descend à la salle à manger. La bonne Lucie a déjà fini de déjeuner et, abritée de son immense chapeau blanc, s’en est allée peindre dans la campagne, car, depuis trois ans, la femme du grand artiste s’est révélée, elle aussi, peintre de talent. Sitôt son déjeuner fini, Utrillo reprend son rêve, ses allées et venues. Il parcourt le jardin à pas rapides et d’un air préoccupé, revient en arrière comme s’il avait oublié quelque chose, monte à son atelier pour peindre une demi-heure, feuillette son livre d’heures dont il baise pieusement les pages. Il n’est en équilibre que lorsque sa bonne Lucie est à son côté. Alors ses yeux s’éclairent d’une lueur douce, il s’exprime avec des mots choisis, joue avec les chiens, va contempler les perruches.

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 La traditionnelle bouteille de vin rouge existe toujours, mais non pas constamment à portée de sa main, reléguée à l’office et souvent passée subrepticement sous le robinet par la vigilante épouse ! tous les soirs, un peu avant l’Angelus, saint Utrillo, comme l’appellent en plaisantant quelques amis, se rend à sa chapelle pour faire oraison jusqu’au dîner qui réunit les deux artistes. Enfin, c’est l’heure du travail, l’intimité de l’atelier, jusqu’à deux heures du matin. Tout se tait dans les propriétés voisines, les trains ne passent plus, dans la volière, les perruches bleues sont endormies. Alors Utrillo, lui, se réveille et prend ses pinceaux.  La lueur de l’électricité qu’il préfère au jour, il reproduit en couleurs délicates et fondues l’infinie variété de la nature. A ses côtés Lucie Valore brosse une de ces toiles ingénues et éclatantes qui ont d’emblée conquis la faveur du public. Ce couple d’artistes s’est montré parfait pendant l’occupation, refusant de vendre aux Allemands, cachant des réfractaires et donnant généreusement des tableaux représentant plusieurs millions pour la Résistance et les œuvres de prisonniers. La générosité d’Utrillo est d’ailleurs bien connue. Une maxime naïve s’inscrit sur le mur de leur salle à manger : « tout ce qu’on donne fleurit – tout ce qu’on garde pourrit. » Et ils aiment la mettre en pratique.

 

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Le miracle est que, dans cette vie ouatée de confort et de tendresse, Utrillo est resté l’artiste prodigieux qui n’existe qu’en fonction de son état de peintre. Il n’est pas sorti de son royaume de solitude et de silence et ses toiles peuvent atteindre les plus hautes cotes, il ne sera jamais entraîné dans la ronde des arrivistes. Canalisé, mais inchangé. Le génie est immuable. Il est d’ailleurs revenu à sa première manière et ses sujets de prédilection restent Montmartre et les villes de banlieue, les rues désertes entre des maisons pauvres mais rayonnantes de poésie, des murs lépreux mais caressés par le soleil, l’humble carrefour où l’on croit entendre la rengaine nostalgique d’un joueur d’orgue de Barbarie, à moins que ce ne soit, derrière ce volet mi-clos, la vieille boîte à musique (ö Déodat de Séverac) qui égrène sa candide ritournelle. Utrillo psalmodie le calme désoeuvrement des choses, le bonheur sans histoire. Un bonheur que ne connaissent pas les assoiffés de vitesse, un bonheur ignoré de ceux « qui s’ennuient au logis. » Deux perruches bleues s’aimaient d’amour tendre…"

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