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09/10/2013

GEORGES MANDEL : PREMIERE NOMINATION AU GOUVERNEMENT LE 8 NOVEMBRE 1934

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La chronique de François de Roux lors de la première nomination de Georges Mandel à un poste ministériel

 

« Les registres de l’état-civil indiquent que Monsieur Mandel est venu au monde à Chatou, le 5 juin 1885. Il ne faut pas trop se fier aux registres de l’état-civil. En réalité, Monsieur Mandel est né le jour où il collabora pour la première fois avec Monsieur Clemenceau. C’est sa venue au monde politique qui lui donna la vie.

 

La première rencontre de Monsieur Mandel et du Tigre date d’il y a prés de trente ans. Monsieur Mandel, qui était passé par le lycée et la faculté de droit, venait d’achever sa deuxième année à l’Ecole des Sciences…politiques, naturellement. Il était alors très maigre. Il avait un nez pointu. Il ressemblait à un rat. A vingt ans, il était comme à cinquante. Physiquement, Monsieur Mandel n’a pas changé.

Le jeune licencié en droit avait une ambition…provisoire. Il voulait faire partie de l’équipe de Clemenceau. Il ne voulait que cela : mais il le voulait bien. Clemenceau n’était pas commode à aborder. Muni de plusieurs lettres de recommandation, Monsieur Mandel avait tenté en vain, plusieurs fois, de se faire écouter par le directeur de l’Aurore. Déjà tenace, il ne se décourageait pas. Et le jour où il réussit, Clemenceau  était de fort mauvaise humeur.

Le chapeau sur l’oreille, il quittait, un soir, le soir pour aller dîner, lorsque Mandel parvînt, on ne sait comment, à s’agripper à lui. Clemenceau rentra dans son bureau avec le jeune gringalet.

Les collaborateurs pensèrent que le Tigre atterré ne ferait qu’une bouchée de sa maigre proie. Pas du tout. Après un quart d’heure, la porte s’ouvrit  et l’on vit Clemenceau  souriant apparaître aux côtés de Mandel, souriant aussi. Les deux hommes se dirigèrent vers la salle de rédaction.

-         Messieurs, dit Clemenceau, je vous présente un nouveau collaborateur, Monsieur Mandel qui rédigera désormais le bulletin quotidien de politique étrangère…Monsieur Mandel ne connaît absolument rien à la politique étrangère. C’est ce qui m’a décidé à l’engager. Je suis sûr ainsi qu’il n’apportera dans son travail ni préjugés ni parti pris.

La fortune, pour la première fois, souriait à Monsieur Mandel. Clemenceau apprécia tout de suite ce garçon merveilleusement renseigné sur tout ce qui touchait au Parlement et à ses coulisses, et qui avait la politique dans le sang. A la faveur de ces rares qualités, il lui arrivait de ne pas très bien écrire le français. Une fois, cependant, il le fit appeler et lui dit :

-        Mandel, vos articles ne sont pas plus bêtes que d’autres : mais ils sont mal rédigés. Désormais, pour chaque phrase, vous êtes autorisé à user, d’un sujet, d’un verbe, d’un complément direct…direct, vous m’entendez…Quand vous tiendrez absolument à mettre un complément indirect, vous viendrez me demander l’autorisation.

Monsieur Mandel n’a jamais été un grand journaliste. Mais il fut un chef de cabinet extraordinaire, de 1917 à 1919. Il entreprit, dés ce moment-là, de se faire des ennemis un peu partout. C’est la tactique  qu’il a toujours suivie, et qui lui a toujours réussi…

Au cabinet de Clemenceau, Mandel put exercer, en fait, une fonction qu’il aime entre toutes et qu’il n’est pas encore arrivé à rattraper depuis quinze ans qu’il l’a perdue…Il fut le véritable ministre de l’Intérieur.

A la place Beauvau régnait alors mais ne gouvernait pas, un vieux monsieur riche et courtois, qui,  sur l’ordre de Clemenceau, s’était cinq ans auparavant, présenté à la Présidence de la République contre Poincaré, et avait échoué. On l’appelait Monsieur Pams.

Tout au début de leur collaboration, Mandel allait presque quotidiennement au Ministère de l’Intérieur, indiquer au ministre ce qu’il devait faire. C’est même au cours d’une de ces visites qu’il découvrit que le bureau du sous-secrétaire d’Etat avait été déménagé et transporté dans la cave, en prévision des raids de gothas.

Monsieur Mandel fit promptement remonter au deuxième étage le courageux sous-ministre, qui, devant la colère du délégué du « patron », ne savait plus où se mettre.

Par la suite, Monsieur Mandel ne quitta plus son bureau de la rue Saint-Dominique. Monsieur Pams se dérangeait et venait lui-même aux ordres.

La guerre achevée, comme il était difficile de prolonger indéfiniment la Chambre de la Victoire, on fixa au 16 novembre 1919 la date des élections. Monsieur Mandel était tout-puissant.

Il se présenta en Gironde à la tête d’une liste qui, seule dans la France entière, eut le droit de s’étiqueter « clemenciste ». Ce mot nouveau servait à double fin : c’était à la fois une recommandation et une opinion politique. Monsieur Mandel entra au Parlement en triomphateur.

Cependant, Clemenceau qui avait conservé le pouvoir avait vu, avec regret, Mandel quitter son cabinet, Mandel qui lui rendait de si grands services et des plus variés.

On raconte, qu’au moment de l’Armistice, chaque fois que Clemenceau sortait du ministère, il trouvait dans la cour une délégation « de quelque chose », précédée d’une petite fille qui tenait à la main un bouquet et de l’autre un compliment écrit.

Clemenceau, excédé, avait fini par trouver un truc excellent. En passant, il disait : « je n’ai pas une minute mais Mandel est un autre moi-même. Dites-lui le compliment et donnez-lui les fleurs. Il embrassera à ma place cette charmante enfant.

A la Chambre, Mandel tenta par de savantes  combinaisons, de faire entrer son grand patron à l’Elysée. On sait qu’il ne réussit pas. Pendant toute la législature, il perdit son temps en manœuvres inutiles. Il faisait alors partie d’un petit groupe, se réclamant de Clemenceau, qui comptait notamment parmi ses membres André Tardieu et Loucheur.

Ces messieurs désiraient le pouvoir, le pouvoir intégral. Loucheur lâcha le premier pour entrer comme ministre des Régions Libérées dans un cabinet Briand. Ca, c’était naturel. Ce qui l’était moins, c’était l’obstination de Mandel…Elle a fini par céder après quatorze ans.

De méchantes langues assurent qu'elle aurait cédé beaucoup plus tôt si un président du Conseil avait eu l’idée, avant Monsieur Flandin, d’offrir le moindre maroquin à Monsieur Mandel. L’offre tardive du ministère des PTT lui a permis de rester toujours fidèle à son chef.

Vivant, Clemenceau eût certainement pris de travers la collaboration avec Flandin. Mort, il ne pouvait même pas empêcher Mandel de déposer une gerbe sur le monument des Champs-Elysées avant d’assister à son premier Conseil.

Voici donc Monsieur Mandel à la tête d’une administration qui compte deux cent mille agents et qui dispose du Central Télégraphique, du Central Téléphonique et de la radio…La radio française est en piteux état. On attend, depuis quinze jours déjà, que Monsieur Mandel veuille bien s’occuper d’entreprendre une réorganisation. Il y a la une tâche urgente et nécessaire, plus importante que les petits jeux parlementaires.

On attend aussi Monsieur Mandel à la première grêve des postiers. Lui, il attend autre chose. Il attend le ministère de l’Intérieur…Et il pense que rien ne presse puisque Clemenceau lui-même n’est devenu pour la première fois le premier des flics qu’à soixante ans passés."

 

« Voilà »  - 1er décembre 1934

 

 

Commentaires

à l'Auteur,

Que vous êtes passionnant, donneriez vous à ma Fille de 22 ans des cours d'histoire le samedi soir car elle prépare l'ENA après avoir réussi EIP Paris.

Écrit par : de la Haye | 04/06/2010

Madame

Je vous remercie du compliment.
Ce serait avec plaisir mais vous me surestimez car un programme de l'ENA nécessite je le suppose une vue plus vaste et plus synthétique englobant l'histoire du monde des origines à nos jours.

Écrit par : arrivetz | 07/06/2010

Monsieur,

Je vous remercie pour votre accord, je crois que vous avez les compétences. Ma fille va vous dire en quoi concerne le programme exactement mais je suis sure que tout ceci vous sera familier.

Écrit par : de la Haye | 12/06/2010

Monsieur,

Ma fille n'a pas encore pu vous joindre car elle travaille beaucoup à notre plus grande satisfaction mais voyant que samedi 18.09 vous serez surement au cinéma nous viendrons en famille et je vous la présenterai pour que vous fassiez connaissance pour les futurs cours.
Je suis sure que tout se passera très bien, afin de vous reconnaître confirmez moi que vous n'êtes pas très grand avec des cheveux blond-vénitiens.

Écrit par : de la Haye | 13/09/2010

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