17/08/2011
HENRI IV, UN ROI LIE A L'AMENAGEMENT DE CHATOU
Henri IV, neveu de François Ier monté sur le trône en 1589, avait une passion, la chasse, sans doute le seul plaisir avec les femmes qui eut distrait le « Vert-Galant » des intrigues et des complots assiégeant son trône. Peu avant sa mort, le roi avait pris deux décisions qui marquèrent la vie de la commune et dont l’historien Paul Bisson de Barthélémy a rappelé l’existence dans son « Histoire de Chatou et des environs » : le 7 avril 1607, Henri IV acheta en raison de son caractère giboyeux au seigneur de Chatou, Thomas Le Pileur, conseiller et secrétaire du roi, la forêt de la Trahison, ces bois du Vésinet appartenant à Chatou que l’Etat devait conserver jusqu’au Second Empire avant de les céder à la compagnie Pallu à la suite d’un échange (prélude à la création de la future commune du Vésinet sur le territoire de Chatou en 1875).
Habitué en outre du château de Saint-Germain-en-Laye dont il avait terminé l’extension commencée sous Henri II, dite « le château neuf », Henri IV prenait le chemin le plus court pour arriver à bon port, et en l’occurrence, le bac de Chatou. Le 9 juin 1606, les chevaux refusèrent de prendre le bac pour revenir à Paris. Celui-ci se renversa dans la Seine avec le carrosse. Quelques heures plus tard, le roi faillit se noyer avec la reine au bac de Neuilly. Cette journée éprouvante eut une conséquence heureuse pour Chatou : Henri IV demanda que l’on construisît des ponts sur la Seine.
Après nombre de difficultés, les ponts de Chatou virent le jour sous Louis XIII à la suite d’un arrêt du Conseil d’Etat de 1626 (celui de Neuilly fut construit dés 1611). Louis XIII, qui, en tant que dauphin, avait fait partie avec Henri IV des équipées de Chatou, eut des mots semble-t-il très favorables aux habitants de Chatou lorsqu'il fallut choisir un emplacement pour le pont qui ne ruinât pas le commerce du village.
Gravure du journal "Le Monde Illustré" représentant la restauration du château de Saint-Germain-en-Laye en 1863 avec suppression des pavillons par l'architecte Millet. Napoléon III en fit un musée des Antiquités Nationales. Henri IV y séjourna.
Quant à Henri IV, après avoir ramené la paix intérieure au terme de quatre ans de guerre religieuse (1589-1593), promulgué l'Edit de Nantes (1598) puis signé la paix avec l’Espagne après trois ans de guerre (1595-1598), il releva l’économie du pays, lui donnant ses premières industries. Il succomba le 14 mai 1610 aux coups de poignard de Ravaillac sans que l’on sut jamais s’il s’agissait d’un acte isolé ou d’un complot.
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12/08/2011
LES VIOLLET : UNE GRANDE FAMILLE DE CHATOU
Parmi les actes de sauvetage sous l’Occupation, l’un est resté à la postérité concernant Chatou grâce au témoignage des victimes, témoignage qui nous a été signalé par un Catovien, Monsieur Michel Grave, qui lui-même poursuit la préservation de la mémoire de cette époque.
Ce témoignage concerne les Freilich, un couple de juifs polonais qui vivait à Paris avec leurs deux fils. Ces derniers furent arrêtés et internés dans un camp mais ayant la nationalité britannique, ils furent traités en prisonniers ennemis et non en juifs. Tel n’était pas le cas de leurs parents, restés juifs polonais. Après la rafle du Vel d’Hiv dont ils réchappèrent, un homme d’église les adressa au chanoine Jean Viollet (1875-1956) de Chatou qui les hébergea jusqu’à La Libération - comme d’autres réfugiés - dans un immeuble qui lui appartenait.
Le 25 juillet 1993, le chanoine Viollet reçut la médaille de « Juste des Nations » décernée par Yad Vashem, Jérusalem. C’est pour cette action qu’il figure dans le « Dictionnaire des Justes de France » (édition établie par Lucien Lazare sous la direction d’Israël Gutzman, éditions Fayard - mars 2003). Le chanoine Viollet, figure indépendante de l’église réputé pour ses écrits et son œuvre ouvrière du Moulin-Vert (l'association du Moulin Vert et la société immobilière du Moulin Vert pour l'habitat social sont ses héritières), s’est vu décerner le nom d’un carrefour dans le quartier Beauregard (quartier dit des "Pentes" dans le cadastre de 1885) derrière la voie ferrée après sa mort. La Ville de Paris lui a également attribué le nom d’un square du XIVème arrondissement.
Le chanoine habita 1 rue du Sentier à Chatou à la suite de son père, Paul Viollet (1840-1914). Ce dernier, sorti premier de l’Ecole des Chartes en 1862, entré à l’Académie Française le 28 janvier 1887 au fauteuil d’Ernest Desjardins, fut un archiviste et un médiéviste de réputation internationale par ses publications, professeur de droit civil et de droit canonique. Il était membre de l’Académie Impériale des Sciences de Saint-Pétersbourg, de l’Académie Royale des Sciences et des Lettres de Copenhague et docteur Honoris Causa de l’Université de Cracovie. Intellectuel catholique, il s’était distingué dans l’affaire Dreyfus en rassemblant un cercle de catholiques dreyfusards.
La villa du 1 rue du Sentier à Chatou où vécut le chanoine Viollet de 1893 à sa mort en 1956 et son père l'académicien Paul Viollet vers la fin de sa vie.
La fille de l’académicien Paul Viollet, Jeanne Viollet, épousa en mai 1900 un certain…Henri Roger (1869-1945), ingénieur, chimiste, directeur d’une manufacture de bronzes d’éclairage, astronome distingué découvreur de la « supernova » en 1918, mais surtout passionné de photographie qui ne cessa de 1886 à sa mort en 1945 de prendre des clichés de la vie parisienne qui demeurent aujourd’hui autant de témoignages pour l’histoire.
La venue à Chatou d’Henri Roger est immortalisée par des clichés du début du siècle avec Jeanne et des photos le montrant en uniforme militaire lors de permissions dans la maison de Chatou pendant la première guerre mondiale. Ces photos sont aujourd’hui la propriété de l’agence Roger-Viollet.
Jeanne Viollet mourut précocement dans sa maison de Chatou le 13 octobre 1917 à l’âge de 41 ans alors que son mari était au front. Du couple était née une fille le 10 juillet 1901, Hélène, également passionnée, qui reprit le fonds photographique de son père Henri. Disparue en 1985, elle fut la fondatrice en 1938 de l’agence Roger-Viollet.
Sources :
M. Michel Grave
Archives Municipales de Chatou
Service de l'Etat-Civil de Chatou
Archives de la Ville de Paris
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08/08/2011
VOYAGE AVEC GEORGES REMON (3)
L’Exposition des Arts Décoratifs de Paris de 1925 a refermé ses portes mais, sept ans après la dévastation de la Grande Guerre, elle vient inaugurer le dernier grand courant d’architecture du XXème siècle porté par la France.
Dans Jardins et Cottages de janvier 1927, le Catovien Georges Rémon affiche sa sévérité à l’égard de ceux qui perpétuent le style de la Belle Epoque. En contre-feu, il présente l’œuvre nouvelle de l’architecte Pierre Patout (1869-1955), un hôtel particulier à Auteuil. Le talent de Pierre Patout, comme celui des ateliers Rémon, sera sollicité par la Compagnie Générale Transatlantique et s’exprimera avec éclat sur ses paquebots « Ile-de-France » (1927) et « Normandie » (1935).
« C’est au cours d’une récente conversation avec Monsieur Pierre Patout, un instant interrompue par le téléphone, que, feuilletant une revue technique, mes yeux se portèrent sur cette déclaration d’un architecte belge d’avant-garde, rapportée par Monsieur Mallet-Stevens : « C’est la dèche qui nous sauvera. »
Cette pensée pourrait être exprimée plus élégamment. Elle ne nous en invite pas moins à prendre en considération l’une des principales caractéristiques de l’art moderne, avide de trouver dans le plus complet dénuement des moyens, dans le rejet systématique de tout ce qui cherche à séduire et à plaire, le fin du fin, la quintessence, l’absolu métaphysique, la beauté pure (comme Monsieur Paul Valéry ne créé que de la poésie pure !), le transcendant obtenu par l’abstraction.
Est-ce à dire, en d’autres termes, qu’à notre époque et par une sorte de fatalité, il ne soit artiste et surtout architecte qui ne s’entende à traiter un programme moins sévère, moins indigent, moins réticent ? ne possédons-nous donc aucun maître d’œuvre qui, tout en respectant le principe éthique et esthétique de la simplification, devenu notre commune mesure, ne puisse se mouvoir à l’aise dans un domaine privilégié et ne sache, par un singulier paradoxe, concevoir une belle œuvre en même temps que luxueuse, du fait seule qu’elle est authentiquement luxueuse. La richesse constitue-t-elle de nos jours un thème d’inspiration en soi si néfaste, qu’il oblige nos architectes à tomber inéluctablement dans le poncif des beaux projets d’école.
Rien à ce propos n’est plus suggestif qu’une promenade à travers ce quartier de La Muette où les heureux de ce monde, grands seigneurs de la finance et des affaires, se sont fait édifier au cours des dix dernières années, de splendides hôtels, dont la somptuosité n’exclut malheureusement pas la banalité.
Cette somptuosité se signale par la surcharge de l’ornement, par l’utilisation des inévitables beaux motifs traditionnels : colonnades, rotondes composites, frontons renaissants. Ainsi les architectes, en dépit des beaux programmes qui leur étaient proposés, n’ont pas pu ou pas su s’affranchir de cette manie ostentatoire et de ce mauvais goût qui semblent avoir atteint leur apogée sur certaines façades Champs–Elysées et qui sévissent un peu partout dans les quartiers riches.
Mais voici une exception, une magnifique réussite due à l’heureuse rencontre d’un homme de goût parfait et d’un maître architecte d’une remarquable sûreté de vue. Rencontre qui bien souvent aussi s’est transformée en précieuse collaboration.
L’hôtel particulier que Monsieur Ducharne s’est fait construire rue Albéric-Magnard, à Auteuil, accuse dans ses moindres détails l’entente qui n’a cessé de régner entre lui et son architecte Monsieur Pierre Patout, à ce point de vue infiniment privilégié. Il ne l’a pas moins été par l’excellence, la clarté du programme qu’il avait à remplir, type d’habitation particulière de haut luxe et d’ample confort et d’une exquise distinction.
L’architecte avait à construire et distribuer un garage pour auto, une galerie de peinture, un grand et un petit salon, une salle à manger avec cuisine voisine, une bibliothèque-bureau, une salle de billard, une grande chambre , trois chambres d’enfants, une chambre d’amis, des salles de bains, un salon d’habillage, un boudoir et, pour les enfants, une salle de culture physique.
L’hôtel, inscrit dans un quadrilatère, comporte trois étages, en retrait l’un sur l’autre du côté du jardin.
La façade sur rue est précédée d’une grille d’un modèle imposé règlementaire, tapissée de plantes grimpantes. Construite suivant le principe de la symétrie, une grande porte rectangulaire en occupe le centre, porte magnifiquement décorée d’une grille en fer forgé, mise en exécution d’après les dessins de Pierre Patout, par Monsieur Llano Florès et exécutée par Monsieur Carrera.
A cette triple collaboration est dû l’escalier dont nous reproduisons l’élégant départ et le motif de rampe de fer forgé.
A gauche de cette porte, la conciergerie et l’entrée de service. A droite, une petite porte pour l’entrée des maîtres. L’automobile pénètre par la grande porte, dépose les voyageurs dans le vestibule et va se ranger dans le garage situé au fond. Ce garage est long de vingt mètres et permet à la voiture d’évoluer et de tourner, prête à sortir sans être obligée de le faire à reculons. Une porte sous le vestibule donne accès à l’antichambre des maîtres où les invités trouvent un vestiaire et des lavabos.
Un escalier en marbre conduit à la galerie de peinture, qui occupe longitudinalement, la partie médiane du rez-de-chaussée de réception. Elle figure ici sous deux aspects, non garnie encore des toiles et des sculptures que leur destine le collectionneur. Construite en stuc, avec dallage en pierre et marbre, elle s’orne d’une vasque en marbre, d’une stèle destinée à recevoir un bas-relief et de hautes colonnes en stuc poli qui communiquent à l’ensemble un caractère de majesté.
On remarque sur une autre vue, l’entrée de la galerie avec les trois degrés de marbre et les hauts piliers tendus d’opulentes soieries de Ducharne. Cette galerie sépare la salle à manger des salons et du billard, situés sur jardins et communiquant avec ceux-ci de plain-pied.
Perspective du salon à la salle à manger
Le premier étage contient la grande chambre et le boudoir, dont les baies donnent sur les terrasses, ainsi que les chambres d’amis, et les trois chambres d’enfants, prenant jour sur la rue. Enfin à l’étage supérieur se trouvent, outre la chambre de la gouvernante, la salle de culture physique et le terrain de jeu en haute terrasse, pour la cure d’air et de soleil.
Telles sont, en bref, les caractéristiques de cette manifestation dont le moindre détail mériterait d’être longuement analysé et décrit. Tout est ici logique, équilibre, judicieux accord entre la maîtrise du savant constructeur et le sobre et élégant dessin de l’artiste, et Pierre Patout est l’un et l’autre éminemment. Il apporte le même soin, la même minutieuse conscience à résoudre le problème du garage ou de la cuisine qu’à jouer en audacieux symphoniste avec les splendides matières avec lesquelles il a édifié les pièces nobles.
C’est ainsi, comme il nous le fait observer, qu’il a utilisé dans la construction de la cuisine le principe de ventilation des grandes salles du Moyen-Age aux puissantes cheminées à hotte. L’air chaud, les fumées et la buée sont immédiatement ventilés et transportés à travers des conduites d’éjection.
Nous ne proposons pas pour cette fois de décrire dans leur délicat raffinement et pièce après pièce, cet hôtel dont les ensembles mobiliers ont été confiés à Ruhlmann, choix dont le moindre mérite n’est pas d’unir une fois de plus le maître décorateur à l’architecte qui avait dessiné les plans du charmant « Hôtel pour un collectionneur » de l’Exposition.
L’hôtel de Monsieur Ducharne procède sensiblement du même esprit. Il suffit pour s’en convaincre d’examiner la grâce et la sobriété des lignes du jardin, dont le mur du fond dessine un nerveux fronton et dont la surface est si heureusement interrompue par deux pilastres quadrangulaires jumeaux.
Mais ce que nous avons pu longuement admirer, sans risquer une indiscrète visite domiciliaire, c’est la splendide façade sur rue, si ingénieusement composée.
Supprimant le jeu monotone des fenêtres uniformément percées, l’architecte a fait se détacher de l’ensemble de la façade, dessinée comme un frontispice, exécutée en marbre blanc guilloché. Ce parti reflète sans nulle supercherie ni trompe-l’œil la disposition des pièces. Il en est le corollaire obligé. Il nous montre en même temps que le dessin discipliné de l’auteur est sa constante préoccupation de fuir tout arbitraire.
Monsieur Pierre Patout a créé sans nul effort apparent, avec une grâce qui frappe et séduit tout d’abord sans forcer nulle part la note, un ensemble dont on discerne très nettement, en dépit et à cause de son harmonieuse simplicité, le caractère de grandeur et la noblesse.
Et il a résolu avec un singulier bonheur ce problème que d’autres paradoxalement envisagent avec scepticisme ou mépris : faire une œuvre, qui, bien que riche et pourvue de moyens exceptionnels, soit vraiment conçue et réalisée sous le signe de la beauté. »
Georges Rémon
Jardins et Cottages- janvier 1927 - n°10
Sources :
Bibliothèque Nationale de France, département Sciences et Techniques
Archives Municipales de Chatou
Bibliothèque Historique de la Ville de Paris
Archives de la Légion d'Honneur
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01/08/2011
NYMPHEE DE SOUFFLOT (1774) : ON FINANCE TOUT SANS ETRE PROPRIETAIRES ?
La sauvegarde du Nymphée :
une affaire plus pitoyable que glorieuse
1999 : à la suite d’une importante campagne de presse initiée par l’association de défense du Nymphée de Soufflot que nous avions créée et notamment d’un article d’Emmanuel de Roux dans le journal « Le Monde » du 14 octobre dans lequel l’architecte en chef des monuments historiques déclarait concernant l’état du Nymphée qu’ « un accident n’est pas impossible », la municipalité a décidé de demander une étude sur l’état du monument, classé depuis 1952. Cette étude aurait eu lieu mais n’a jamais pu être produite et est demeurée sans suite.
2006 : lors du vote du plan local d’urbanisme le 9 novembre, a été inclus dans le nouveau plan le rapport de présentation précisant la position de la Direction Régionale des Affaires Culturelles (DRAC) au sujet du Nymphée. On y lit : « Orientations à venir suggérées par la DRAC : le site est bien conservé et peut être visité. Le syndicat d’initiatives de la ville de Chatou *, en relation avec les propriétaires, organise des visites de cette voûte à la stéréomie surprenante. »
* Précisons que le syndicat d’initiatives de la ville de Chatou avait été dissous trois ans plus tôt par la municipalité
2009-2010 : l'association Chatou Notre Ville consacre une page au Nymphée dans un tract distribué en avril 2009 aux Catoviens à quelques milliers d'exemplaires. La municipalité nouvellement élue en 2008 provisionne 75.000 euros sur les deux exercices 2009 et 2010 afin de financer une étude sur l’état du Nymphée
2011 : la municipalité annonce en conseil municipal que le Nymphée pourrait être restauré sur les fonds publics sans participation des propriétaires et sans acquisition par la collectivité de la parcelle en contrebas sur le quai de Seine sur laquelle se trouve le monument. Le droit de visite serait étendu mais cependant il convient de rappeler que ce droit est négociable annuellement avec les propriétaires.
Notre position : le Nymphée, comme la défunte usine Pathé-Marconi, a été traité de manière pitoyable par les pouvoirs publics qui ne manquent pourtant pas de faire de la mise en valeur des bords de Seine l’un de leurs objectifs. Les propriétaires ont quant à eux failli dans leur mission d’entretien prescrite par la loi, témoignant de surcroît de plus d’obstruction que de bonne volonté.
Il est maintenant acquis que la propriété privée du monument l’entraîne à sa perte depuis vingt-cinq ans. Pour y remédier, l’acquisition de la parcelle en contrebas sur laquelle il se trouve, inconstructible, par une collectivité, nous paraît être la seule solution acceptable et défendable vis-à-vis des Catoviens afin de permettre son exploitation, son rayonnement et par là-même sa sauvegarde, laquelle n'est pas pour nous négociable. Nous indiquons en annexe les articles de loi concernant un changement de propriété du monument.
Face à la Maison Fournaise, le Nymphée représente l’un des derniers vestiges de l’art Français des jardins à la fin de l’Ancien Régime. Il se trouve également lié à l'histoire politique de cette époque par la qualité de son commanditaire, le ministre Bertin.
Extraits de la loi de 1913 sur les monuments historiques :
"Article 9-1
(Loi n° 66-1042 du 30 décembre 1966, art. 2)
(Loi n° 77-1467 du 30 décembre 1977, art. 87)
Indépendamment des dispositions de l'article 9, troisième alinéa ci-dessus, lorsque la conservation d'un immeuble classé est gravement compromise par l'inexécution de travaux de réparation ou d'entretien, le ministre chargé des affaires culturelles peut mettre en demeure le propriétaire de faire procéder aux dits travaux, en lui indiquant le délai dans lequel ceux-ci devront être entrepris et la part de dépense qui sera supportée par l'Etat, laquelle ne pourra être inférieure à 50 p. 100. La mise en demeure précisera les modalités de versement de la part de l'Etat.
L'arrêté de mise en demeure est notifié au propriétaire. Si ce dernier en conteste le bien-fondé, le tribunal administratif statue sur le litige et peut, le cas échéant, après expertise, ordonner l'exécution de tout ou partie des travaux prescrits par l'administration.
Le recours au tribunal administratif est suspensif.
Sans préjudice de l'application de l'article 10 ci-dessous, faute par le propriétaire de se conformer, soit à l'arrêté de mise en demeure s'il ne l'a pas contesté, soit à la décision de la juridiction administrative, le ministre chargé des affaires culturelles peut, soit faire exécuter d'office les travaux par son administration, soit poursuivre l'expropriation de l'immeuble au nom de l'Etat. Si les travaux sont exécutés d'office, le propriétaire peut solliciter l'Etat d'engager la procédure d'expropriation ; l'Etat fait connaître sa décision sur cette requête, qui ne suspend pas l'exécution des travaux, dans un délai de six mois au plus et au terme d'une procédure fixée par décret en Conseil d'Etat. Si le ministre chargé des affaires culturelles a décidé de poursuivre l'expropriation, l'Etat peut, avec leur consentement, se substituer une collectivité publique locale ou un établissement public.
En cas d'exécution d'office, le propriétaire est tenu de rembourser à l'Etat le coût des travaux exécutés par celui-ci, dans la limite de la moitié de son montant. La créance ainsi née au profit de l'Etat est recouvrée suivant la procédure applicable aux créances de l'Etat étrangères à l'impôt et aux domaines, aux échéances fixées par le ministre chargé des affaires culturelles qui pourra les échelonner sur une durée de quinze ans au plus, les sommes dues portant intérêt au taux légal à compter de la notification de leur montant au propriétaire. Eventuellement saisi par le propriétaire et compte tenu de ses moyens financiers, le tribunal administratif pourra modifier, dans la même limite maximale, l'échelonnement des paiements. Toutefois, en cas de mutation de l'immeuble à titre onéreux, la totalité des sommes restant dues devient immédiatement exigible à moins que le ministre chargé des affaires culturelles n'ait accepté la substitution de l'acquéreur dans les obligations du vendeur. Les droits de l'Etat sont garantis par une hypothèque légale inscrite sur l'immeuble à la diligence de l'Etat. Le propriétaire peut toujours s'exonérer de sa dette en faisant abandon de son immeuble à l'Etat.
Article 9-2
(Loi n° 66-1042 du 30 décembre 1966, art. 2)
Les immeubles classés, expropriés par application des dispositions de la présente loi, peuvent être cédés de gré à gré à des personnes publiques ou privées. Les acquéreurs s'engagent à les utiliser aux fins et dans les conditions prévues au cahier des charges annexé à l'acte de cession. Des cahiers des charges types sont approuvés par décret en Conseil d'Etat. En cas de cession à une personne privée, le principe et les conditions de la cession sont approuvés par décret en Conseil d'Etat, l'ancien propriétaire ayant été mis en mesure de présenter ses observations.
Les dispositions de l'article 8 (quatrième alinéa) restent applicables aux cessions faites à des personnes publiques, en vertu des dispositions du premier alinéa du présent article."
Pour l'association, la situation est claire : la cession du terrain du Nymphée, inconstructible et en contrebas du terrain principal des propriétaires, soit par voie amiable soit par voie d'expropriation par l'Etat puis sa cession- pour une somme symbolique compte-tenu des travaux à entreprendre - par l'Etat à une collectivité publique, commune, conseil général ou autre, est la seule garantie d'une exploitation en proportion des sacrifices financiers consentis unilatéralement, mais surtout la seule garantie d'une préservation du monument jusqu'ici livré à la situation d'incapacité de propriétaires privés et d'absence d'ouverture au public significative.
Cette opportunité de devenir propriétaire du terrain du Nymphée ne se représentera pas. Ne commettons pas une erreur définitive.
Histoire : le Nymphée représente le seul vestige du domaine de Bertin, dernier seigneur de Chatou de 1762 à 1789, intendant du Roussillon en 1750, de Lyon en 1754, lieutenant général de police de Paris en 1757, puis ministre de Louis XV (contrôleur général des finances) et de Louis XVI (affaires étrangères, agriculture, mines...) de 1759 à 1781. Partisan de la réforme Maupéou des Parlements sous Louis XV, le ministre Bertin se distingua par sa probité et son activité en faveur des Finances (guerre de Sept Ans), de l’Agriculture, des Chartes, des Postes et des Mines, laquelle lui valut une considération sans faille des souverains.
Bertin développa les sociétés d’agriculture sur l’ensemble du territoire, créa les écoles vétérinaires, le cabinet des Chartes, le premier réseau postal d’envergure, eut l’intelligence de promouvoir l’instauration d’un cadastre, ce qui entraîna sa chute du contrôle des finances en 1763 à la suite de la révolte des Parlements, et d’encourager les ministres réformateurs. Afin de l’honorer à la suite de sa délicate mission de Contrôleur Général des Finances pendant la guerre de Sept Ans, Louis XV lui accorda la seigneurie de Chatou et de Montesson.
A Chatou, il réalisa un parc, un château et un nymphée, ainsi qu'un terrain voué à l’agronomie et à l’élevage des moutons mérinos qui s’étendait aux terres de Montesson.
Le parc fut une œuvre décorative comportant six statues de l’ancien fronton de l’aile droite du château de Versailles, des statues antiques, douze bustes en marbre d’empereurs romains, un pavillon chinois et un jeu de bagues dont l’exécution fut confiée à Lequeu. Deux pots à feu du château de Versailles et conservés depuis à l’ancien bailliage furent disposés également.
Le château fut réalisé en 1780 par Jacques Germain Soufflot, l’un de nos plus grands architectes, auteur du futur Panthéon et des « travaux d’embellissement » de Lyon, Intendant des Bâtiments Civils du roi de 1776 à sa mort prématurée en 1780.
Le Nymphée fut conçu par Soufflot qui en délivra les plans en 1774. Par suite de sa maladie, son exécution fut terminée en 1777 par Lequeu.
Le parc fut anéanti à la Révolution.
Le château fut détruit en 1912.
Le Nymphée échappa de peu à la destruction en 1914 grâce à la guerre, laquelle fit sombrer un projet de lotissement sans état d’âme. Un article de l’Illustration faisant état des démarches de la Société de Protection du Paysage et de l’Esthétique de la France en atteste. Sa conservation fut finalement acquise dans le lotissement du parc de Chatou dans les années 20.
Folie ornementale, le Nymphée recueillait les eaux de ravinage en provenance du domaine pour les conduire jusqu’à la Seine. Le monument, d’une trentaine de mètres de long, éclaire les bords de Seine de sa polychromie originale, assise sur des matériaux ordinaires, scories de mines et pierres meulières, apportées sans doute par Bertin, qui fut notamment ministre des Mines.
Ci-dessous, une affiche de la conférence réalisée par l'association le 19 mai 1999 avec Monique Mosser, chercheur de renommée internationale sur les jardins, sur l'oeuvre de Soufflot.
A cette époque, nous avions créé une seconde association consacrée uniquement au cas du nymphée de Chatou et alerté les médias. "Le Monde", sous la plume du regretté Emmanuel de Roux, fit un article éloquent sur la situation calamiteuse du nymphée abandonné par les ministères de la culture successifs, les propriétaires et les collectivités locales démissionnaires.
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